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shokrane bezaf

  • cestpartipouruntour
  • 15 oct. 2014
  • 7 min de lecture

Arrivés par bateau à Tanger Med, notre carte imprécise nous conduit à Ceuta (enclave espagnole). La route est panoramique, mais très montagneuse et assaillie de vents forts et d'un brouillard épais. Belle entrée en matière! Nous qui nous nous réjouissions des routes planes depuis deux semaines, nous voici à nouveau échauffés et prêts à affronter les montagnes du Rif. Notre avancée croise de nombreux migrants, survivant de mendicité le jour, dans les bosquets la nuit, tous espérant un improbable passage vers l'Europe.

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Tetouan est notre première ville marocaine. La médina est malheureusement inaccessible à vélo et nous reportons cette découverte à plus tard, mais une grande majorité des rues et ruelles sont encombrées de marchands ambulants. La ville se résume à un grand souk: bruits de toutes parts, odeurs fortes, couleurs multiples, sourires jusqu'aux oreilles ou regards interloqués, rabatteurs insistants,..., le dépaysement est troublant! A la sortie de la ville et prenant la direction de Chefchouan, nous croisons deux cyclotouristes français exténués, Alain et Bruno, tous deux partis du Mans et l'un se rendant à Dakar pour y voir sa soeur, l'autre au Mali pour découvrir le désert de l'Adrar (www.enroutepourlemali.fr). Bruno connaît bien l'Afrique de l'Ouest pour y être allé plusieurs fois et il nous fait part de nombreuses combines, points d'arrêts obligatoires et précieux renseignements pour la suite de notre voyage. Tout en discutant sur le bord de route, Alain se fait subtiliser ses lunettes de vue par un gamin à vélo qui s'éloigne au loin. D'autres, un peu plus agés et ayant assités à la scène, décident alors de le courser pour revenir de longues minutes plus tard avec les précieuses lunettes. Ouf! “Bienvenue au Maroc”, nous disent-ils...

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L'heure étant tardive, nous poursuivons notre route ensemble quelques quinze kilomètres plus loin jusqu'à un village niché dans les contreforts de la montagne. Le bled en disposant pas d'hôtellerie, on questionne le tenancier du bar, A., dans lequel nous dégustons un thé à la menthe. Il nous propose alors de loger à l'étage du bâtiment toujours en construction. Bruno et moi-même visitons les lieux: la pièce n'est pas terminée, ne dispose ni de châssis, ni de point d'eau et nous serons accompagnés d'un mouton pour la nuit, mais peu importe, l'endroit fera l'affaire. Nous nous écartons du village pour faire un brin de toilette dans les oliviers, puis y revenons souper. De retour au bar pour un thé digestif, T., le frère de A., nous souhaite la bienvenue, passe la commande et s'attable avec nous. Tout en discutant, il sort son matos: un grosse boule de shit et un sac plein de kif (poudre de haschisch). Ce dernier il le fume, puis nous propose un pétard. Quand au shit, il le divise en part égales destinées à la vente. Voyant que l'on était intéressés ni par l'un ni par l'autre, il sort alors des doses de cocaine de sa braguette. T. est un commerçant un peu particulier certes, mais au demeurant très sympathique et nous poursuivons notre conversation quant une agitation soudaine nous surprend: “Passeports!”. “Police!” Un homme nous demande avec insistance nos passeports. Dans un premier temps, on refuse d'un seul homme, puis arrive la police. Elle nous explique devoir prendre nos coordonnées histoire d'éviter le moindre problème chez nos hôtes. Peut-être s'agit-il d'une manière de nous suivre à la trace ou encore de rencontrer les seuls étrangers du village? Cette mesure est en tout cas répandue dans tout le Maroc. Les autorités finissent par nous offrir un verre histoire de détendre l'atmosphère. Minuit approche et on envisage tout doucement d'aller se coucher...C'était sans compter sur un revirement total en matière d'hospitalité La police étant intervenue et A. ne souhaitant pas être considéré comme un hôte “à la petite semaine”, il souhaite maintenant nous accueillir chez lui. Toute la famille s'est réunie autour de nous et C., la soeur de A., nous servira d'interprète. La grand-mère arrive alors avec un couscous, du pain, des olives, du saucison rapé, des grenades, du thé.... On s'efforce de faire honneur à toute cette gentillesse. Repus, on tente de s'endormir sur les couchettes de la pièce principale, là où dort normalement toute la famille exceptés les parents. Gênés de cet accueil un peu forcé, mais finalement tellement reconnaissants, Bruno matérialise nos remerciements en offrant son casque à un enfant de la famille.

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On reprend ensuite la route tous les quatre vers Chefchaouen, dont le nom signifie “sommets” en arabe. La destination du jour s'annonce dès lors haut-perchée et de fait, les huit derniers kilomètres sont une succesion de passage à 12-13%. Marqués par l'effort, deux camping-caristes anglais nous offrent deux briques de vino tinto espagnol. Quelle aubaine dans un pays où les boissons alcoolisées sont quasiment introuvables! Le lendemain, un sentier pédestre nous conduit jusqu'au centre-ville. Les rues sont calmes, car, fêtant l'Aïd en famille, les moutons sont égorgés la plupart du temps dans les cours des maisons. Lorsque le sacrifice a lieu en rue, le sang rouge vif dégoulinant se mélange aux jolies nuances de bleu de la vieille ville (médina). Certaines entrées, couvertes d'un enduit tout en rondeurs et peintes en bleu, prennent des hallures de grottes de glace. Ca rafraîchit autant qu'une bonne bière fraîche que l'on a pas!

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Pédalant machinalement en pleine ligne droite tout en profitant des vues et des gens qui changent sans cesse, quelque part entre deux bleds, je me rends compte que le vélo est le moyen de transport le plus adapté pour découvrir le Maroc.Suffisamment rapide que pour échapper aux très nombreux vendeurs de kif, à la gente masculine parfois trop entreprenante avec Pauline et aux enfants qui quémandent et suffisamment lente que pour saluer en retour les nombreux mots d'encouragement: “Soyez les bienvenus”, “Bon voyage”, “Bonjour amigo”,”Bon courage”...et profiter de la vie agglutinée sur et le long des routes. On y retrouve des maraichers le coeur sur la main, l'un nous offrant des grenades et des fruits d'argousiers, un autre des bananes, des mandarines et des pains sous prétexte que nous soyons sportifs. On croise des ânes chargés de grosses barriques bleues remplies d'eau. Les épiceries pulullent, toutes proposant les mêmes produits, des troquets aussi, remplis d'hommes uniquement sirotant un thé et regardant le foot ou des volleyeuses peu vêtues à la télévision...

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Puis, lors d'un arrêt pause midi, entendant que nous parlions français, un Marocain prénommé Ali s'approche d'Alain. Il lui explique être lié de coeur avec la langue française pour avoir fait des tables de conversation français-arabe avec une personne remarquable il y a de çà quarante ans. Il nous invite à partager le repas de famille du dernier jour de l'Aïd. On prend place: les hommes d'un côté, assis sur des chaises en plastique, les femmes de l'autre, assises sur des sacs de farine. On échange sur les pratiques locales, sur le travail, sur les coutumes du mariage,... Nous sont servis des brochettes épicées, des kefta puis des cuisses de chèvre cuites à la vapeur et saupoudrées de cumin, le tout accompagné de pain fraîchement cuit au four et arrosé de Coca-Cola et de thé à la menthe. On se régale!

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Pauline, pendant ce temps, discute avec les filles tout en préparant les brochettes...L'une d'entre elles lui présente alors une vilaine blessure et Pauline lui donne des antibiotiques, une autre s'est mariée il y a une semaine et lui montre les photos du mariage, une dernière enfin se marie la semaine suivante et nous invite tous les quatre! Pauline en profite pour partager notre petit album de famille qui attire beaucoup de curiosité. Côté hommes, Ali se plaint du prix de l'eau courante. Il nous dit payer 3.500 Dirham (350 euro) pour trois mois de consommation, un prix très élevé pour les salaires marocains trois à quatre inférieurs aux nôtres et incroyable quant on sait que l'eau et sa distribution sont aux mains d'une entreprise appartenant au Roi Mohamet VI. Ali paie en quelque sorte un impôt à son roi...Le repas se termine et on les quitte groguis de cette rencontre riche et de ce partage si spontané.

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Fes se dessine au loin. Sur conseil de Bruno, nous logeons dans un hôtel situé dans la médina, juste à côté de la porte Bab Bou Jeloud, la plus belle de toutes. Après quelques tractations sur le prix de la chambre, on s'installe puis on dîne sur la terrasse ensoleillée profitant d'une vue splendide sur les souks en ébulition.

Profitant d'une journée de “repos”, Mohamed, un enfant rencontré dans la médina, nous conduit dans les endroits les plus intéressants moyennant quelques dirhams. Première étape: les tanneries séculaires. Un homme nous emmène sur la terrasse des commerçants. Une branche de menthe sous le nez (contre les odeurs), on l'écoute nous expliquer les techniques de traitement 100% naturelles. La laine restante des peaux de moutons, de dromadaires, de chameaux ou de chèvres est retirée au moyen d'eau mélangée à des fientes de pigeons et à de l'urine (ammoniac naturel). Les peaux sont ensuite trempées de longues semaines dans des bacs d'argile contenant de l'eau colorée de pigments naturels: du coquelicot pour le rouge, du bois de cèdre pour le marron, de l'indigo pour le bleu,...A ce jour encore, cette tannerie fait vivre 170 familles de Fes!

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On poursuit par la visite d'une pharmacie traditionnelle produisant notamment son huile d'argan: l'une alimentaire au départ d'amandes torréfiées, l'autre cosmétique au départ d'amandes naturelles. Caractéristique importante: l'argan est un business de femmes uniquement, regroupées en coopérative. C'est assez rare que pour le signaler, car hormis des productrices d'argan et des tisserandes, l'économie du pays est entièrement aux mains des hommes! Un changement passera, nous semble-t'il, par l'éducation des femmes et la revendication de leur droit à l'égalité. On rejoint ensuite la place des Dinandiers, là où le cuivre est martelé pour faire des marmites à confiture. On termine par la visite de la Medersa, école coranique magnifique dont les façades sont un subtil mélange de stuc et de cèdre de l'Atlas sculptés finement.

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Fes nous a ouvert l'une de ses quatorze portes de la médina. On la quitte à l'aube, au son du muezzin, un petit déjeuner marocain engloutti, prêts à affronter une journée qui s'annonce diffcile sous la chaleur: pente régulière sur soixante kilomètres et 1200 mètres de dénivelé. Sortis de Fes après dix kilomètres, on aperçoit en effet les sommets de Moyen-Atlas qui nous attendent...

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