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du coup de pédale au coup de bêche

  • cestpartipouruntour
  • 18 déc. 2015
  • 5 min de lecture

De longues journées à pédaler, un terrain terriblement plat et une chaleur humide que nous espérions passée. Tous les ingrédients pour une "routine" cyclotouriste sont réunis et c'est dans ces moments que l'on puise dans nos remèdes brise-ennui. Une rencontre Warm-Shower? Oui, mais ceux sollicités ne répondent pas. Un long trek? La région n'y est pas adaptée. Prendre le temps pour un volontariat alors? Voilà la bonne idée: le Nord de la Thaïlande est rempli de projets innovants en matière d'agriculture durable. Les mois se succédant, la réflexion aussi, une synthèse bien personnelle d'un monde idéal se construit dans nos têtes: la permaculture s'impose à nous, concept alliant production alimentaire autonome, éco-construction et utilisation parcimonieuse des ressources vitales. La permaculture, en deux mots, c'est prendre soin des hommes et de la terre en mélangeant les savoir ancestraux avec les découvertes de pointes de l'agro-écologie. La ferme Sahainan semble répondre à ces attentes, alors on s'organise rapidement, on laisse nos vélos au Laos et après 1 jours et demi de bus, nous arrivons dans cette ferme au bout d'un chemin défoncé.

Première impression, celle de retourner en semi-primitivité. Tout y est très basique, huttes en bambou, point d'eau froide pour se laver, cuisson au feu de bois. Sur une étagère, des bols en noix de coco, couverts et gobelet en bambou, quatre casseroles; c'est à peu près tous les ustensiles à bord. Yuki, un volontaire Japonais qui travaille à la ferme avec toute sa famille depuis deux semaines nous montre notre hutte. Sur le sentier, on découvre une parcelle en cultures sur buttes, des terrasses de riz abandonnées et un peu partout des arbres à cajoux.

Svea, une volontaire suisse au sourire intarrisable poursuit avec nous le repérage: une hutte en construction, la salle de bain en terre/latté de bambou et le jardinet en spirale qu'elle prépare amoureusement. Le décor est planté, reste à connaitre le personnage, Sahan, le proprio et surtout l'action. Notre hôte débarque sur le coup de 16h, il revient des Philippines oú il a été invité à une rencontre de permaculteurs sud-asiatiques. Le voyage c'est pas son fort dit-il, de fait, il a raté deux avions de suite. Après une reconnaissance des feuilles comestibles du jardin et des arbustes, on aide à la préparation du souper, et devinez quoi... y'a du riz ce soir et il y en aura à tous les repas!

Nous nous salirons véritablement les mains dès le jour suivant, on commencera par bêcher de nouvelles planches (ou buttes). Au fur et à mesure, nous deviendrons des spécialistes du sarcloir car il faut aussi creuser un puits et un terre-plein pour la nouvelle hutte. Les jours se suivent rapidement, nous essayons donc de vivre chaque instant passionément. On plante des jeunes bananiers, on bêche, on sème en quantité, on bêche, on ramasse le bois, on bêche, on cuisine, on b... Entre les coups de pelles nous faisons connaissance d'une ribambelle de gens ultra-sympas. Il y a Vanessa et Laure qui parcourent cette partie du monde de volontariat en visites et de séjour en temple boudhistes en randos. Sous le même toit de chaume s'abrite Hope, une Américaine formatrice en environnement qui est partie visiter la Thailande entre deux contrats. Un peu plus loin c'est le logement de Ran et Graham, eux aussi des States, mais en baroude permaculturelle depuis plusieurs mois/années (le mystère restera entier jusqu'à la fin du séjour).

Sahan est un joyeux luron qui vagabonde d'un bout à l'autre de la ferme lorsqu'il n'est pas sur sa moto pour ramener quelqu'un ou quelque chose du village. Pas vraiment d'explications donc sur ce qu'on fait. En permaculture, chaque chose à une raison d'être et s'emboite dans un système, alors pourquoi planter tels légumes ici? Quelle doit être la composition idéale de la butte? Comment fait-il son biochar (charbon de riz)? Pour compléter les bribes que nous glanons, il faudrait suivre la formation en permaculture que Sahan démarre justement la semaine prochaine mais ce n'est ni dans nos plans ni dans notre budget. Car ici tout est payant, la formation bien sûr, mais aussi le volontariat. 5$ par volontaire par jour, Sahan a de quoi arrondir ses fins de mois vu le nombre de volontaires, mais c'est devenu malheureusement la norme dans ce genre de projet ici dans le coin. On continue donc la liste des présentations: il y a Chhaya du Cambodge et aussi les nippons Yuki et Zaé et leurs enfants Yorudai et Koyuki qui ont quitté leur vie de femme au foyer, pour elle, et travail de 14h par jour pour lui (modèle qui se généralise au Japon apparement...) pour une immersion dans la perma pour 3 mois et peut-être lancer leur ferme dans quelques années. Vient aussi de débarquer Némo, un cycliste belge (yeah!) qui nous vient tout droit de la capitale du plat pays mais par l'est et en 3 ans et demi s'il vous plait. Avec Cris et Edouard (un froggy de retour d'un tour voyage/travail en Australie), ils formeront le trio de choc, littéralement, car il s'agira, outre de creuser, de tronconner des arbres entiers à la machette (l'unique hache est cassée/perdue/inutilisable, entourez au choix).

La vie en communauté s'organise très fluidement, les tâches se font sur base volontaire car Sahan ne planifie rien. Sauf le marché du samedi! Là c'est branle-bas de combat, tout le monde se recoiffe et décrasse son pantalon et on part au village à 1h30 de marche. Chacun retrouve la civilisation et ses petits plaisirs, pour moi ce sera internet qui m'apprendra... que je suis devenue marraine pendant la nuit! On fête ça aux nouilles sautées assis en cercle sur la pelouse du grand marché. Les jours suivants, à côté du travail paysan on vit cette "belle nature": on se délecte du bruit des gouttes de rosée sur notre hutte, on ne se lasse pas d'observer les dizaines de constellations, couchés en étoiles sur le water tank... et le temps file. Le stage de formation commence et voilà qu'arrivent de nouvelles têtes, Catherine et Marine du Vietnam/France, et Lyn de Corée du Sud, s'y joignent aussi Yuki et Ran. On entend leurs rires d'élèves épatés aux quatre coins de la ferme (un peu comme comme lorsque nous donnions cours donc:) ).

Alors rien n'est parfait bien sûr, par exemple l'absence d'explication et d'espace collectif, l'achat des légumes qui nous nourrissent, alors que la moitié serait tout à fait cultivable en quelques mois ici. Mais reste que le passage des pédales à la bêche en compagnie de ces bourlingueurs d'un mois et plus nous a passionné, on en redemande bien sûr!

 
 
 

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